La figure ci-dessous, qui sert de frontispice à l'édition princeps de 1537, sera réutilisée par le libraire Jehan Morin en 1538 pour une édition du Roman de la rose.

[...] on y voit une femme au-dessus de le devise : probitas laudatur et alget (on loue la probité, elle souffre). W. Boerner (Boerner Wofgang. Cymbalum Mundi de Bonaventure Des Périers. Eine Satire auf die Redpraxis in Zeitalter der Glaubensspaltung. Munchen, Wilhem Fink Verlag, 1980, 416p. Cité par Yves Délègue.(Yves Délègue, Le Cymbalum Mundi ou la parole en question dans Bonaventure Des Périers "Le cymbalum Mundi" Éd. Honoré Champion Paris 1995. pp. 39-40.)) a décrypté cette figure : la probité est vêtue en sa partie droite comme un personnage glorieux (couronne de laurier, cheveux bouclés, palme en main, robe traînante) et en sa partie gauche comme une pauvresse (cheveux raides, bâton de mendiant, habit loqueteux). De part et d'autre de son visage, une inscription qui semble prononcée par deux têtes angéliques, exhorte au courage : EUGE SOPHOS, en avant le sage ! Des Périers aimait se désigner dans ses poésies sous le nom de pauvre Dédalus. Se serait un jeu de mots découlant de son activité de copiste, pour souligner son habileté à se servir de ses plumes.

Henri Just dans un essai La pensée secrète de Bonaventure des Périers et le sens du Cymbalum mundi (Henri Just  La pensée secrète de Bonaventure des Périers et le sens du Cymbalum mundi Fontana éditeur, 47, rue de Provins, Casablanca (Maroc), 1945.) décrit plus finement la gravure.

Au centre de la gravure une femme vêtue de haillons. Le sein droit est à nu, le sein gauche à découvert. A la main droite entre le pouce et l’index une canne dont la pointe est dirigée vers les pieds qui sont disposés en équerre. Le genou gauche est à nu, le genou droit est couvert. De

Jehan Morin imprimeur

chaque coté à hauteur de la tête, deux têtes ailées sortant des nues, l’une murmure « Engé » l’autre « Sophos » courage sage. En perspective deux bâtiments, à gauche une église en ruine, et à droite un temple. Au-dessous de la gravure comme pour en indiquer le sens un vers de Juvénal : « Probitas laudatur et alget » soit l’image de la probité décorée des signes de l’honneur ; la palme et la couronne. Cette probité platonicienne n’est là que pour nous égarer. Détaillons les signes de cette femme en haillons. Les déchirures du vêtement découvrent un sein et un genou, à coté de l’autre sein et de l’autre genou qui restent couverts. C’est l’invitation à découvrir ce qui est couvert ou le sens occulte.

Le geste hardi de la main droite élève une palme. C’est la palme que les juifs portaient au temple. Le temple évoque Salomon. Nous pensons aussitôt en face de cette femme plantureuse à l’allégorie de la sagesse. Ses deux pieds indiquent par leur nudité qu’elle vient du temple et par l’équerre qu’ils dessinent le constructeur. Dans la main gauche le bâton de commandement est le signe du pouvoir de Juda (Gen. XLIX, 10). Les deux têtes ailées parlant de sagesse correspondent aux deux séraphins de l’arche, et leur parole est de feu. Ils soufflent l’idée de la propagande que nous allons retrouver au quatrième dialogue. [...]

Comme l’Ecclésiaste est le dialogue de l’homme de bien et de l’impie, le Cymbalum Mundi sera le dialogue de Thomas l’incroyant et de Pierre le croyant. [anagramme du sous-titre dédicatoire « Thomas du Clenier à son ami Pierre Tryocan »] «Probitas laudatur et alget »  la langue du pauvre est méprisée dit l’ecclésiaste (IX. 16).